Le Nil comme berceau

Le détail d’une fresque d’un tombeau égyptien représentant un esclave nourrissant de figues une oie est un témoignage de cette tradition millénaire (Nécropole de Saqqarah).

Les bords du Nil étant un point de passage de la migration des oies et canards, les Egyptiens observèrent leur faculté naturelle à constituer des réserves de graisse. Avant d’affronter le voyage du retour, ils reproduisirent cette tendance naturelle des palmipèdes et mirent ainsi au point des pratiques d’alimentation progressive (représentées sur plusieurs tombeaux égyptiens).

Sur les traces du foie gras

Cette tradition a été diffusée et perpétuée, entre autres par les communautés juives en exode qui utilisaient l’engraissement des oies pour produire des matières grasses remplaçant ainsi le saindoux (considéré comme impropre à la consommation).

Le foie engraissé deviendra en latin «jecur ficatum» (le foie dû aux figues). Le foie gras apparaît pour la première fois sur une table romaine au Ier siècle avant Jésus Christ, lors d’un fabuleux banquet rapporté par Horace. L’engouement des Romains pour le foie engraissé aux figues est tel que, des le IV° siècle « ficatum » (aux figues) devient l’appellation pour le foie de tous les animaux engraissés. Il donnera quelques siècles plus tard le terme anatomique « foie ».

La France, terre d’accueil du met des rois

C’est pendant la période romaine que le foie gras sera d’abord consommé dans la "Provincia" puis peu à peu dans différentes parties de la Gaule romanisée, dont le Sud-Ouest. De nombreuses populations de l’Empire Romain, et bien-sûr nos ancêtres les Gallo-Romains, vont alors devenir les spécialistes de cette préparation. Ensuite, pendant tout le Moyen-Age, ils consommeront des animaux engraissés et leur foie gras sous différentes préparations. Dans de nombreuses langues régionales, des mots seront même synonymes de gavage. A partir du XV° siècle, le maïs, alimentation particulièrement adaptée aux oies et aux canards, est rapporté du nouveau monde par Christophe Colomb et voit sa culture se développer dans cette région.

Au XVII° et XVIII° siècles, la production de palmipèdes gras est une des bases de l’alimentation des paysans. En effet, la cuisson et la conservation des foies et viandes dans la graisse permet de constituer des réserves rappelant que le congélateur n’est arrivé que bien plus tard. Paradoxalement, le foie gras était aussi servi aux tables des rois et des Grands du Royaume sous l’Ancien Régime.

Au XIX° siècle, la mise au point des procédés d’appertisation favorise l’émergence de conserveurs qui deviendront de grandes maisons, lesquelles en diffusant leurs foies gras dans le monde entier, vont très vite en faire l’un des fleurons de la gastronomie française. Depuis cette époque, le foie gras fait partie intégrante du patrimoine culinaire et culturel de la France.